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Vincent Blénet – Ecrivain

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S.D.F.

17 mar 2007 par vincent

S.D.F.

Dans une rue, un SDF au style de vêtement militaire, du nom d’Antonio, sort d’un snack un sac à la main, rempli de bières. Il marche vers la “ comédie “; en passant il croise des SDF qu’il salut.
Il arrive sur la place de la Comédie  et se dirige vers le magasin  la Redoute. En marchant il regarde des militants de la Fédération Paysanne, rassemblés sur l’esplanade, dont le leader, debout sur un banc et muni d’un mégaphone, revendique leurs droits.

     LEADER (via le mégaphone)

Ne laissons pas les Etats-Unis nous envahir ! Ils achètent nos terres, nos légumes, notre vin, nos champagnes, franchisent leurs restaurant et prennent nos chefs cuisiniers en les bourrant de Dollars ! Ne finissons pas coloniser !

Antonio passe devant des Camelots qui appellent les gens pour marchander, devant les “ Témoins
de Jéhovah qui distribuent leurs livres et devant un Camelot qui attend. Devant un mur vitrée de la “ redoute “, deux SDF, installés, font la manche. Le plus jeune se nomme Valentin et le plus vieux Pascal

     VALENTIN

Sérieux, il s’est fait virer y a deux jours parce qu’il planquait la came sous son matelas !

     PASCAL

Pourtant il paraissait règlo devant tout le monde !

     VALENTIN

Ouais, il paraissait… (Antonio arrive et essaye de suivre la conversation ), mais la veille du jour où il s’est fait virer, un des bénévoles l’a surpris se shooter avec une seringue !

     ANTONIO

Qui ?

     VALENTIN

Le gars qui s’est fait virer y’a deux jours !
     
     ANTONIO

Celui qui faisait la “chenille” avec deux gars dans les douches !

     VALENTIN (il semble se souvenir)

Putain, j’avais oublié !

     PASCAL

C’est quoi la “chenille” ? (Antonio commence à expliquer)

     VALENTIN (coupant Antonio)

J’ai compris !

     PASCAL

Moi pas !

     VALENTIN (expliquant)

Ils s’enculaient à trois.

     ANTONIO

Un des bénévoles les a surpris…

     PASCAL

Putain, il fait dans la discrétion celui là !

     ANTONIO

J’ai apporté des bières !

     VALENTIN

On les garde pour ce soir.

     ANTONIO

Vous avez ramassé combien ?

     PASCAL

Pas de quoi pouvoir manger.

     ANTONIO

Pourquoi, vous aussi vous faites la manche dans le coin de la “redoute”, au lieu de vous installer sur l’allée ?

Deux passants croisent les trois SDF.

     VALENTIN (il s’approche d’eux)

Bonjour madame, bonjour monsieur, vous n’auriez pas une pièce ou deux s’il vous plait ?

Les deux passants ne répondent pas et continuent leur chemin. Valentin, Pascal et Antonio les
Regardent avec amertume.

     VALENTIN

Enculés !

     PASCAL

C’est comme ça tous les jours.

     ANTONIO

Vous avez pas répondu à ma question !

     VALENTIN

Laquelle ?

     ANTONIO

Pourquoi vous faites la manche ici, au lieu de la faire sur l’allée ?

     PASCAL

Parce qu’on est à l’ombre ! La semaine passée, Valentin et moi, on s’est mis sur l’allée. Au bout de
Vingt-cinq minutes on a capitulés et le bilan, personne ne nous a donnés quoi que ce soit.

     VALENTIN

On transpiraient comme des boeufs, comme on nous fuis du regard d’habitude, t’imagine !

     PASCAL (à Antonio)

Tu sais l’heure ?

     ANTONIO

Non !
     VALENTIN (se levant)

Je reviens !

Valentin arrive sur l’allée

     VALENTIN (à une passante)

Excusez-moi madame, vous n’auriez pas l’heure s’il vous plait ? (La passante ne fait pas attention,
Valentin s’énèrve), non c’est sur, me donne pas l’heure, au cas où je pourrais te violer, connasse !

Valentin reviens vers Pascal et Antonio

     ANTONIO

Alors ?

     VALENTIN

On la saura par un bénévole.

     PASCAL

On y va ?

Pascal se lève, ils vont vers la Comédie

     PASCAL

C’est tout à l’heure que tes parents t’appellent ?

     VALENTIN (monotone)

Ouais.

     ANTONIO

Sur la même cabine téléphonique ?

     VALENTIN

Forcément, ils ont que ce numéro !

     ANTONIO

T’aurais pu le changer !

     VALENTIN

Ce n’est pas le cas.
Ils passent devant le camelot, que Valentin salut, qui continu d’attendre, les “Témoins de Jéhovah”
Qui essayent de distribuer leurs livres et les camelots qui marchandent.
Ils passent sur la “comédie”, Valentin regarde les militants de la Fédération Paysanne et leur
Leader qui affirment leurs convictions

     LEADER ( via le mégaphone, suivit des militants )

Non à l’envahisseur américain, non à cette colonisation américaine, non à l’achat américain de nos terres !

Valentin les regarde, les trois SDF s’éloignent de la Comédie.
Dans une salle, d’un service social, où des SDF mangent, Valentin, Pascal et Antonio sont
Installés à une table. Ils mangent

     VALENTIN

Où est-ce qu’on va ce soir ?

     ANTONIO

On commence par le Peyrou !

     PASCAL

Bien pensé !

     VALENTIN

Mais on ne pourra pas rester longtemps, je crois qu’ils ferment à dix heures !

     PASCAL

Quoi d’autres ?

     VALENTIN

L’Esplanade ?

     PASCAL

Non, c’est remplit de dealers à vingt-et-une heures !

     ANTONIO

Il y a aussi des cailleras !

     VALENTIN

Où est-ce qu’on va alors ?

     ANTONIO

A coté de la préfecture, y aura des gars à nous ?

     VALENTIN

Tu crois que les bières qu’on a, ça sera suffisant ?

     ANTONIO

Ils en amèneront !

     VALENTIN (se retournant, à un bénévole)

Excusez-moi, quelle heure est-il s’il vous plait ?

     BENEVOLE (regardant sa montre)

Il est quatorze heures dix-sept !

     VALENTIN

Merci !

Un employé du service social arrive

     EMPLOYE (aux SDF)

Excusez-moi, ceux qui veulent des vêtements, allez à l’accueil, nous avons reçu des vêtements. On les a mis dans un local, vous pouvez en choisir dès que vous aurez finit de manger !

     ANTONIO

S’il vous plait ?

     EMPLOYE

Oui ?

     ANTONIO

J’ai deux questions.

     EMPLOYE

Allez-y.

     ANTONIO

Est-ce qu’on auras des sacs plastiques ?

     EMPLOYE (étonné)

Oui, pourquoi ?

     ANTONIO

Pour les accrocher à mon lit, pour pas que ça soit le bordel !

     EMPLOYE

Je pense que si vous les mettez bien sur votre lit ce sera ordonné pareil !

     ANTONIO

Non parce que quand il y en aura un de nous tous qui sera bourré et qu’il devra dégueuler, ce sera pas sur mes vêtements !

     UN SDF

Ouais, l’autre jour, le gars qui se shootais…

     VALENTIN

…qui niquait, aussi, dans les douches !

     UN SDF

C’est ça, celui que vous avez viré, je sais pas ce qu’il avait pris ce jour là, mais un jour, pendant que je discutais avec des gars, il revenait en titubant, il est arrivé devant mon lit et il s’est mis à dégueuler dessus. Je suis arriver, on s’est engueuler, on a commencer à se battrent et on nous a séparer !

     EMPLOYE

Ne vous inquiétez pas, on vous donnera des sacs plastiques. La deuxième question ?

     ANTONIO

C’est limité jusqu’à quand ?

     EMPLOYE

La distribution ?

     ANTONIO

Ouais.

     EMPLOYE

Quand vous aurez tout pris !

     PASCAL (à l’employé)

S’il vous plait ?

     EMPLOYE

Oui ?

     PASCAL

Est-ce qu’il y aura des chemises hawaïennes ?

     UN DEUXIEME SDF (nerveux)

Qu’est-ce qu’on en a à foutre ?!

     PASCAL (s’irritant)

T’as gueule, je me renseigne !

     EMPLOYE

On n’a pas regardé, on a tout installé il y a cinq minutes comme on les a reçu il y a dix minutes.
(Aux SDF) Des questions supplémentaires ? (Ils ne disent rien) merci de votre attention,
Bonne fin de journée !

L’employé part.

     ANTONIO

Heureusement qu’ils donnent des sacs !

     PASCAL

Bordel, j’ai oublié de poser une question !

     VALENTIN

Laquelle ?

     PASCAL

Combien de vêtements on peut prendre.

     VALENTIN

On est pas à “C&A”, tu prends juste de quoi t’habiller c’est tout !

     ANTONIO (parlant du service social )

On les ruineraient sinon !

     PASCAL

J’y avais pas pensé !

Devant la “Redoute”, Valentin, Pascal, vêtus d’une chemise hawaïenne et Antonio sont installés.
Pascal et Antonio sont assis contre le mur vitré et Valentin, debout, fait la manche

     VALENTIN (à une passante)

Bonjour madame, vous n’auriez pas une pièce ou deux, s’il vous plait ? (La passante part sans dire un mot, des jeunes passent) excusez-moi jeunes gens, vous n’auriez pas une pièce ou deux,
S’il vous plait ? (Les jeunes s’éloignent sans dire un mot, Valentin se sent ignoré, un passant
Arrive) bonjour monsieur, auriez-vous la gentillesse de nous donner une pièce ou deux, s’il vous plait ? (Le passant s’arrête et lui donne une pièce, Valentin sourit) merci à vous, bonne fin de
Journée ! (Soudain trois flics passent au loin) Putain, les condés !

Les flics arrivent, la discussion s’engage.

     FLIC 1

Qu’est ce que vous foutez là, vous faites la manche ?

     VALENTIN

Non, on discute, on a le droit non ?

     ANTONIO

Ce n’est pas prohibé par la loi Sarkozy ça ?

     FLIC 2

Alors, dégagez, allez  discuter autre part !

     PASCAL

Putain, on ne dérange personne ?

     FLIC 1 (nerveux)

On vous dit de dégager, vous dégagez point.

Valentin, Pascal et Antonio se lèvent et partent, les flics aussi

     VALENTIN

Connards de condés !

Devant une cabine téléphonique où Valentin a une conversation avec ses parents, Pascal et Antonio
Attendent à côté. Le SDF qui s’est fait virer les a vus et arrive, Antonio fait signe à Pascal de son arrivée, puis ils détournent leur attention

     VALENTIN (au téléphone)

Ouais Papa, ils militaient tout à l’heure !… comme Bové est en taule, ils sont combatifs !… on va se balader pareil ! (Le SDF s’approche près du sac des bières posé par terre)… vous sortez
Toi et maman ? (Coupant son père, en lâchant le téléphone, nerveux en regardant le SDF)
Tu n’approches pas de notre sac, enculé !

     LE SDF

Je ne m’approche pas, je regarde !

     VALENTIN

C’est ça, t’allais aussi planquer ta came dedans !

Pascal prend le téléphone pour expliquer ce qui se passe au père de Valentin

     LE SDF (s’énervant)

Fais-toi enculé, tu me parle bien !

     VALENTIN

Va jeter tes seringues plus loin !

     LE SDF (s’en allant et menaçant)

Toi, je te retrouverai !

     VALENTIN

C’est ça connard ! (Il reprend le téléphone)… c’est rien, c’est un gars de chez nous qui s’est fait virer parce qu’il se shooter et aussi parce qu’il faisait la “chenille” dans les douches !… avec deux
Gars !… je vais pas te faire un dessin théorique !?… ils s’enculaient à trois dans les douches !…
il allait foutre ses mains pleine de came dans notre sac où il y a nos bières !… sinon, vous faites quoi
Maman et toi ce soir ?

Sur le Peyrou, Valentin, Pascal et Antonio sont installés, ils regardent le paysage.
Soudain, un clochard ivre passe en hurlant et en agitant sa bouteille, les trois SDF le regardent
Avec réflexion. A côté de la préfecture, Valentin, Pascal et Antonio boivent leurs bières avec des SDF

     VALENTIN

Putain les “Témoins de Jéhovah”, tous les jours ils sont sur la comédie ces enculés !

     SDF 1

T’as vus comment ils sont sapés ?

     PASCAL

Tous en tenue de “Wall Street”, cravate et compagnie !

     ANTONIO

Bordel, ces enculés s’enrichissent sur le mental des gens !

     SDF 2

Quand ils te prennent, ils te lâchent plus et si on t’en sort, on t’interne pour t’enlever ces croyances Que les “Témoins de Jéhovah” t’auront programmé dans le cerveau !

     VALENTIN

Comment les gens peuvent et même osent dire que, d’un point de vue, la religion chrétienne est pareille, ça me dépasse !

     PASCAL

C’est impensable, surtout que si tu dis que tu aime Jésus, que tu crois en lui et que tu suit sa volonté,
On t’interne parce que les gens ont peur que certain peuvent croire en la religion chrétienne et
Qu’elle soit vérité !

     VALENTIN

Mes parents vont tous les dimanches à la messe, ils ont des amis croyants, tous sont libres. Si ils
ne peuvent pas aller à l’office, pour on ne sais quelle raison, le paroissien ne les blâmera pas !

     SDF 3 (s’apercevant qu’il n’y a plus de bières)

Valentin ?

     VALENTIN

Quoi ?

     SDF 3

Tu vas nous chercher des bières ?

     VALENTIN

Ouais, passe-moi l’argent.

Le troisième SDF lui passe quelques pièces, Pascal lui en passe quelques unes, Valentin les mets dans ses poches, descend la rue et se dirige vers un snack. Il achète des bières et sort du snack
Pour revenir à coté de la préfecture. Le SDF, qui l’attendait, s’approche vers lui en sortant une arme et tire deux coups dans la tète de Valentin, le SDF lui prend les bières et part.
Valentin, allongé par terre, est seul dans la rue…mort.
Une existence  anéantie..

Vincent Blénet

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