COLLATERAL
1 mar 2007 par vincent
Un thriller sans temps mort, qui dévoile l’aperçu d’un monde opaque, celui des tueurs, des mafias et réseaux de l’ombre, aux règles implacables et dépourvus de toute conscience.
C’est aussi la confrontation de deux destinées au travers d’univers diamétralement opposés, et qui vont se trouver face à face dans une ville gigantesque, fascinante et complexe, au cours d’une nuit aux impacts psychologiques criants.
Au cœur de Los Angeles, une nuit, Max – un chauffeur de taxi rêveur – vient de prendre son service et reste avec l’image de sa dernière cliente. Un homme – Vincent – se présente pour une course, mais Max est dans ses pensées. Il reprend ses esprits lorsqu’il voit le client se diriger vers un autre taxi et ignore que cela va changer le cours de son existence. Vincent lui dit avoir cinq courses à faire durant la nuit et lui propose une somme importante pour être son chauffeur. Max accepte sans se douter que son client est un tueur à gages, à la pointe de son art, et que les cinq arrêts sont en fait des contrats à honorer.
Le scénario est brillant, rapide, efficace et percutant. Très actuel et réaliste, il n’oublie aucune éventualité ! Il anticipe même les réactions et conséquences que l’action peut engendrer.
Malgré sa violence et sa froideur, le scénario laisse transparaître une certaine humanité en mettant l’accent davantage sur le personnage de Vincent et en le mettant en relief, alors que ce type de personnage est d’habitude comme « invisible ». Nous infiltrons ce monde ténébreux à travers le regard de Max et sa naïveté, sa sensibilité.
Ce qui est frappant dans l’histoire c’est qu’au départ Vincent est comme une machine. Peu à peu on le découvre humain avec un passé, des blessures d’enfance, comme tout le monde, qu’il s’efforce de masquer pour justifier sa dureté, son travail. Il veut cacher son innocence violée, qui l’a conduit à cette noire réalité qu’est sa vie actuelle. C’est là un paradoxe qui interpelle.
Le rythme scénaristique est intense et soutenu, ce qui peut parfois surprendre car on ressent une certaine agressivité et de l’impulsivité dans le déroulement narratif. Il y a une évolution progressive et constante dans la vision de ces deux personnages qui se remettent, chacun à sa manière, en question.
On ressent aussi beaucoup de profondeur dans certaines répliques ou situations.
Dialogues très contemporains et travaillés, ils sont d’une perspicacité étonnante sur les comportements humains et retranscrivent bien les réflexions préconçues que chacun de nous peut avoir sur les autres. L’écriture est souple et prenante.
La scène de la fusillade dans la boite de nuit met en évidence des univers aux antipodes et, contrairement à ses règles, Vincent se montre à découvert. L’invisible devient visible, donc vulnérable.
Le jeu de Tom Cruise est convaincant, très profond et il domine complètement son personnage, sachant passer de la plus terrible froideur et dureté à une certaine émotion.
La réalisation, très esthétique et instinctive, se révèle spectaculaire avec des images époustouflantes sur la ville de L.A., et aussi intimiste ou habile. Michael Mann fait parfois glisser sa caméra comme sur du velours lors de quelques prises de vues notamment aériennes.
La caméra semble vivante et agressive sur certains passages, douce dans d’autres, un contraste qui frappe et une maîtrise de l’adaptation aux scènes qui laisse rêveur !
Le montage est manifestement détaillé, élaboré et précis. Il suit le rythme narratif et émotionnel.
Magnifiques photographies qui nous emmènent au dessus de la ville, comme dans un avion, avec des cadrages extraordinaires qui montrent la beauté de cette immense cité, démesurée et si belle avec le scintillement de toutes ces lumières comme des étoiles dans le firmament.
Ce film « coup de poing » est remarquable. Extrêmement préparé, comme ciselé à l’avance, il place Michael Mann en orfèvre du cinéma hollywoodien.
Vincent Blénet