CRYPTE AUX POLICES
21 déc 2022 par vincent
Emmuré vivant, les mensonges me lacère et me dévore, lentement, progressivement, sûrement. Je vois défiler les temps, chacun plus indécents, plus déviants que les précédents.
Confiné dans cette crypte, forçat d’hosties chimiques, imbibé de neuroleptiques empoisonnés.
Les heures se comptent en cicatrices. Les âges en décalage, les martèlements séculaires, parfois les mœurs sanitaires. Les troupeaux dénaturent leurs bergers, au point de les scotcher au chatterton sur le bûcher médiatisé, puis d’en commercialiser la mise à mort.
Flammes en ‘Pay-Per-View’, hérésie en PayPal, blasphèmes à la carte du requiem.
Sacralisation du sacrilège, règne aliénant d’un fou canonisé, louanges de perversions déviées.
Emmuré vivant dans la crypte, mes hurlements répétés finissent par être intégrés, mémorisés dans mon âme. Je lacère de griffures les parois de mon cercueil de confinement, à l’usure, que je griffe mais en vain. Je finis par me laisser gagner par la folie, la rhétorique de dame démence finit par devenir concubine sexuelle. Impassible me semble être l’immortalité.
Hagard, je suis un vieillard confus et perdu dans un microcosme de jeunesse.
Je suis confronté, voire tétanisé, face à tellement de beautés, jouvencelles, tourterelles et fausses pucelles. La dérive m’enivre et mes couilles en pendouillent.
Non pas d’allégresse mais résolument ivre d’amères tristesses.
Confinement brutal, séquestration et frustration à l’extrême.
La lourdeur de mes burnes s’affaisse, vieillesse coupable, jouvenceau tardif, faute d’être encore ignorant de belles histoires de fesses, vivre d’ailes avec elles, « I BURN »…
À longueur d’éternité, sanglé, drogué, effrayé et effaré par la dénature de leur nature.
Les heures deviennent torture, les heures assèchent mes pleurs, les heures remplacent la lueur par de multiples douleurs.
Les heures égayent l’inquisiteur, les heures deviennent l’inquisition.
Emmuré vivant dans la crypte aux polices. Recueil des passions accusatrices.
Castré par leurs défiantes déviances, forçat des horreurs érigées en honneur. Mes balloches pendent, elles sont châtiées comme l’intransigeant verdict carnassier vis-à-vis de l’hérésie. Parfois je fais le mime d’un déchu pendu, en discret retrait, la honte d’y avoir crû.
Mon corps est familier de meurtrissures, carence de caresses, mon corps appelle le ciel à ce qu’elles lui apparaissent. Il appelle les cieux à entendre la douceur d’elles, à entendre leurs symphoniques désirs, à toucher leurs divines ailes de mille plaisirs.
Vivre d’ailes avec elles, en corps à corps, d’un commun accord. Encore et encore.
Embrasement de tous les sens, désenchantement aux mille passions.
Brasiers des intolérances, procès faits de girouettes inconstantes.
Emprisonné, sanglé dans cette crypte, je danse entre sanglots et chaos.
Chaque aube me fait plonger dans un cercle tourmenté, un manège infernal à traverser.
Tous ces cercles effroyables sont remplis de peurs, d’ivresses malsaines, de châtiments inquisiteurs, de voix cauchemardesques vociférant l’addition à casquer.
Chaque aperçu de ces cercles est un gigantesque vacarme d’âmes horrifiques, tournoyant toutes dans des flammes. Leurs hurlements valsent dans la folie alors qu’ils crament. Carences des repères, violences de père, enfer des pairs. Trouilles d’inconfort, instabilité omniprésente.
Désenchantement et embrasement incessant, j’excelle dans la vigueur de l’enragement.
Emmuré dans la crypte aux polices, on n’y respire que regrets, on n’y respire que remords, victimaires. Le spectre des règles d’antan me murmure par-delà la brume. Mais je griffe encore les parois du cercueil sanitaire, j’essaie de lutter contre l’absolu désespoir. Encore.
Confusion schizophrénique dans un Monopoly fou à lier. J’y apprends l’adolescence incarcérée dans un linceul mortifère. Je découvre mon scaphandre et mes ailes une fois cloitré dans le cercueil. Sanglé par la bienséance, censures inquisitrices, cendres et cicatrices.
Lacérations dégustatives et jouir de se haïr. Dedans on ne respire que mort et morsures.
Calciné dans le cercueil sanitaire, sanctuaires des blasphématoires, j’en pleure l’absente vue des étoiles. Cet onctueux panorama attestant la magnificence des ténèbres, libre d’être.
La beauté de la nuit me manque. Idem en ce qui concerne l’acrylique saisissant d’un soleil.
Le manque d’espace me force à réfléchir, il pousse ma stratégie à trouver de l’oxygène.
Par n’importe quel moyen je cherche de l’air, je lacère le cercueil, au lieu d’aspirer l’air j’en consomme davantage et j’épuise dix fois plus mes réserves d’oxygène confiné avec moi.
L’espérance est un leurre. Faute d’option luxuriante, de choix : barrière des classes.
L’ennui me ronge.
Je me damne, je m’enflamme, je dérape. Je lacère de griffures les parois de mon enclave, j’en ai marre et j’en suffoque affreusement. Enfermé, je me contorsionne comme un asticot pâlot sous prise d’amphétamines, ce dernier gesticulant vivement afin de limiter ces fortes scarifications par les rayons brûlants du soleil qui traversent les planches de ma prison.
Ça fait tellement longtemps qu’on ne m’a plus autorisé à voir le jour.
L’usure, la lassitude des époques brisant chaque siècle au fur et à mesure. Le confinement incendie mes lèvres, je brûle d’insulter cette satanée résilience.
La provocation est un exquis délice, une forme de ‘thérapie’ salutaire.
La folie et ses voix vociférantes, la trouille paranoïaque de la démence plus qu’approchante.
La peur tout simplement, celle qui me pousse à lutter contre chacun des échos provenant de toutes ces voix fredonnant à l’intérieur de ma caboche. Bien trop têtu pour lâcher prise et trouver la paix, comment survivrais-je si la notice m’était déjà donnée à l’avance ?!…
Emmuré je m’enveloppe dans un drap de flammes autodestructrices.
La combustion dansait avec mes ailes, ainsi qu’avec mon ‘organique’ scaphandre, l’ennui devint une distraction négationniste addictive.
Accro à me détruire, j’excelle !
L’enfer serait donc pavé de bonnes intentions, tiens donc ?!…
Dans la torture, à travers la tourmente, je savoure le nectar de mes plaies ensanglantées.
J’entends par-delà mon cercueil les prêcheurs, ces inquisiteurs, se nommant ‘‘indicateurs’’ rabâcher que la haine est saine, ils hurlent que la mort est divine, que vivre est malsain. Survivre est répréhensible, passif de châtiment lapidaire, sans procès, directement exécuté sur leurs tribunaux publics.
Je sens l’odeur des bûchers frémir, probablement quelques contestataires jugés par les bourreaux du fanatisme en marche.
Il est vrai que si l’amour est un sentiment unificateur, tellement puissant, c’est malheureusement les maux de la haine qui ont fédéré chaque royaume issu de tous les univers existants et coexistant.
Bâillonné par un cathéter bourré d’éther, je savoure l’abandon, j’inhale la trahison.
Mère, Père ? Suis-je là par raison ou par erreur ?!… Pourquoi je me sens non-désiré ?!…
Vivre avec l’enfer, danser avec mille horreurs, subir les enfers et valser avec mille hérésies.
Peindre l’enfer pour mieux en retranscrire ce blasphème indésirable dont je suis l’abomination. Je renifle chaque braise, je respire chaque souffre jusqu’à la crémation de l’esprit. Davantage je me blesse, davantage je me châtie et davantage je ressens l’absolution des attentes par mes ‘créateurs’, ceux qui m’ont endoctriné, ceux qui m’ont forgé.
La naissance inscrit l’hérésie, elle grave la dévastation, comme un emblème, sur mon front.
« Blasphème je suis blasphème, blasphème je suis… ».
Sanglé par le néant sanitaire, muselé par le Tartare, j’observe la danse infernale des cercles dantesques, j’en mesure la démesure et leur nature.
L’abrutissement des voix horrifiques finit par entacher mon âme.
La moindre allumette égratignée me file l’envie débordante, telle une possession en marche, de me branler, fantasmant à l’ivresse de bien m’autodétruire.
Je m’immole aussitôt le temps de vingt éclipses pour parvenir à éjaculer sur le seuil de vingt apocalypses. Les années s’envolent comme des micros secondes, ma haine dans une verveine.
C’est bien connu, les anges ne sauveront qu’une salve de trimards, parce que les anges déchus existent uniquement afin que les Cieux leur crachent dessus. Père et Mère en sont fiers.
Derrière mon cercueil, les hommes en blanc griffent à leur tour violemment les lattes.
Ils vocifèrent avec prouesse, hurlements endiablés. J’entends cette rage qui les possède dès qu’ils s’imaginent qu’un ‘vilain’ puisse apercevoir et respirer le même enfer où ils sévissent.
Derrière les planches condamnées de mon cercueil, enclos mortifère, il n’y a que d’immaculés canonisés à l’air libre, tous autorisés à prêcher l’ère de rien.
Nous autres pitoyables glaires damnées, nous sommes les prohibés. Condamnés d’être, il nous est interdit de respirer faute de recevoir les châtiments adéquats.
Les imbéciles, orfèvres de la ‘trimardise’, ont déjà gangréné l’exclusivité privative de l’éden, le parfum des cerises et celui des jonquilles sont monnayées aux plus offrants.
À la longue, j’ai la tentation qui taraude mes envies. La tentation aiguise ses incisives, elle mordille mes désirs, elle crame mes pulsions, elle charme mes impulsions.
Défier ces maudits prêtres, satanés prêcheurs, inquisiteurs à la soutane blanche, des hypocrites au sein des cryptes. Les invectiver ce serait rafraichir ma brûlante fièvre. Mais…
C’est alors que le déverrouillage de la serrure du cercueil pétrifie chacun de mes sens.
Mes ailes se recroquevillent tétanisées, non pas la peur d’avancer, ni même de me risquer à vivre sur un fil au-dessus du vertigineux.
Celui-là même qui constitue l’essence même du libre arbitre, prendre ses responsabilités, assumer et accepter ses propres choix, la vie en elle-même quoi.
Funambule entre ténèbres et lumières. Non…
Une trouille pire que ça encore.
Ce qui est pétrifiant c’est que cette interaction de semi-liberté est un casse-dalle cannibale pour mes geôliers en blanc sanitaire, les ecclésiastes du funéraire.
Ces derniers s’approchent de moi, je suis enchaîné et je les dévisage furtivement pour éviter d’attiser leur rage. Ils s’avancent, canines limées et acérées, la bave aux lèvres.
Ils reniflent chaque peur qui transpire de ma chair, leur bave dégouline sur mon visage.
« Ose t’aventurer en dehors du Tartare, c’est la démence sanitaire qui rattrapera chacun de tes pas. Ta guérison est un leurre, tu nous appartiens et il ne saurait en être autrement » me disent-ils, presque comme un murmure menaçant et si intimidant.
Emmuré, sanglé, confiné, tourmenté, effrayé, intimidé.
Je n’en suis plus à un vrillage près, ma raison ne me fais plus confiance.
Pour moi tout est continuel, une rhétorique mécanique, sans aucune logique.
Je me noie et je m’enferme tout seul, comme un grand, sans jamais avoir goûté à mon enfance ni jamais savourer une quelconque adolescence.
Si la terreur est dans ma tête, alors la liberté est une hérésie, un blasphème dans le requiem.
À l’usure je me rends compte que toutes ces souffrances, toute la haine traversée, reniflée, sniffée à démesure, m’habitent.
Je comprends qu’être tombé dans les enfers fût l’héritage de Dieu.
Je me rends compte que Père m’a légué un enseignement bien trop brutal, malgré l’horrifique désenchantement.
L’enfer m’a appris, et il m’apprend encore, à grandir.
Assumer la honte et la culpabilité, affronter ma faiblesse et mon auto-discrimination, m’enivrer de mon autodestruction, de lécher mes fraîches scarifications sanguines, c’était un testament de la part du père.
Apprendre à voir la froideur effroyable de l’horreur au lieu de se bander les yeux et marcher à l’hymne rythmique des mensonges.
L’enfer m’a tristement ouvert les yeux, et si désormais je suis condamné des Cieux parce mon regard est flammes, parce qu’il est blasphème, à présent j’en ai honneur et fierté.
Je revendique et j’affirme.
J’aime désorienter les imbéciles petits freluquets écervelés, pisseurs d’Éden artificiels.
Je compte l’effondrement des siècles comme on se coupe les ongles.
Je calcule la chute des époques, chacune avortant de son tardif éveil, en faveur à la dégénérescence des âges, jamais en accord avec leurs décalages.
Flammes ‘Pay-Per-View’, hérésie PayPal, blasphèmes à la carte, modem de requiem. La peur, la trouille, l’aigreur, toutes mes terreurs font qu’au lieu de grandir, je me cloître davantage.
Je m’enferme, je m’incarcère, je m’isole et je macère dans mon « enfer-me-ment ».
Je prends pour argent comptant ce que veut bien me raconter le temps.
Le paradis était-il blanc ? Il m’a semblé l’apercevoir rouge. L’étalement de notre sang sur chaque nuage brime la détresse de nos hurlements, calcinés par cette épouvantable cage.
Ce qu’on voit n’est pas ce qu’il paraît, l’orgueil pactise avec nos mensonges, l’égocentrisme inaugure une idolâtrie virtuelle, une dévotion cruelle. Abrutissante de décervelages groupés, organisés. Accessibles aux plus désargentés, ciblés, câblés et désignés. Ils rêvassent en masse s’imaginer être d’Artagnan de la pègre, calife à la place de tous califes. Père-version.
Je m’enlise, je m’éternise, je me cryogènise sévèrement dans le fond de mon Tartare.
J’ai si peur de retraverser l’horreur du passé que je m’enterre plus profondément dans mes craintes, celles que j’affirme être des certitudes.
Je vais jusqu’à m’étouffer pour fuir la peur, terreur de revoir le spectre du passé rappliquer.
La vie s’évapore et je ne l’ai pas vue encore.
« Le passé est l’empreinte, celle qui imprègne ton présent. Ton présent n’est que l’auteur de ton futur. Le moment présent est celui qui écrit ce qu’il y aura dans ton À-venir ».
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